La ferme de Fontenelle
Tous les 15 jours, une bonne odeur de pain frais embaume la salle de préparation des paniers de notre amap... ils arrivent de la ferme de Fontenelle de Bruno et Katia Fleury, à Saint-Mars-Vieux-Maisons.
Les champs de céréales bio
Bruno a repris l'exploitation de ses parents en 2001/2002 transformant une bonne partie de l'existant. Il est ainsi passé d'une surface de 90 hectares à 55 hectares aujourd'hui, s'est converti au bio en 2014 et a choisi de transformer lui-même, avec sa femme Katia, sa production céréalière autrefois traitée par une coopérative.
Avec Katia qui fabrique le pain, Steve le livreur qui aide aussi au fournil et Bruno qui sème, récolte les céréales et les transforme en farine, cette petite entreprise fabrique en moyenne 180 pains par jours livrés à une quarantaine d'amap (jusqu'à Paris) réparties en circuits de livraisons les plus cohérents possibles. Trois personnes donc pour tout gérer, de la plantation de trèfle comme engrais verts jusqu'au pain tout chaud et riche en nutriments et minéraux que l'on déguste tous les 15 jours à l'amap de la Ferté.
Les céréales cultivées par Bruno Fleury
Impossible d'augmenter la production malgré la demande sans s'agrandir à tout point de vue.
Mais les choix de Bruno de produire des céréales et un pain de qualité dans le respect de l'environnement ont des conséquences :
Il n'arrose pas ses cultures donc elles dépendent des aléas climatiques : les épisodes de sécheresse de plus en plus fréquents depuis plusieurs années font baisser le rendement et l'empêchent parfois de travailler la terre après les moissons retardant les semailles pour l'année suivante.
Les silos dans lesquels sont stockées les céréales avant d’être décortiquées
En accord avec l'agriculture bio, Bruno ne traite pas et est parfois confronté aux ravageurs tels que des insectes et les sangliers qui détruisent les légumineuses semées pour servir d'engrais azotés indispensables pour "nourrir" les futurs céréales.
Sans compter les hivers trop doux (sans gel une partie des insectes ravageurs n'est pas détruite) et les adventices (= mauvaises herbes) qui, elles, résistent sans soucis à la sécheresse !
Bruno Fleury
Heureusement pour nous, Bruno est passionné et convaincu.
Petit épeautre
Dans la décortiqueuse
Il renouvelle généralement ses propres semences mais cela n'est pas toujours possible.
Les rendements à l'hectare sont d'environ 35 quintaux de blé, 15 pour le petit épeautre et 20 pour le grand épeautre, il obtient 80 à 85 % de farine à partir des céréales, mais les épeautres demandent auparavant des étapes de décortiquage et de triage bien plus contraignantes. Mais leurs apports nutritifs sont incomparables...
Les grains d’épeautre décortiqués
Semés d'octobre à mars les récoltes s'étalent entre juillet et août selon les conditions météo car les grains doivent être bien mûrs, mais pas humides. Les récoltes sont alors stockées dans des silos contenant de 8 à 30 tonnes puis passent au décortiquage, dans la trieuse ou le trieur alvéolaire (type de machine mise au point au 19e siècle lors des débuts de l'industrialisation), parfois à nouveau dans la décortiqueuse et enfin dans un des 2 moulins pour être réduits entre de lourdes meules en pierre de granite gris clair (la meulière de notre région n'étant plus exploitée !).
Les grains d’épeautre prêts à être moulinés
Le moulin à farine
Les moulins sont de fabrication artisanale (dans la Drôme), certains autres équipements viennent de l'étranger (Turquie, Italie et même Japon) car hélas l'on n'en fabrique plus qu'à échelle industrielle en France.
Bruno nettoie les différents tamis du moulin
La transformation des grains en farine intervient seulement 3 mois après la moisson. Le moulin produit environ 15kg de farine semi-complète à l'heure mais ne tourne pas en période chaude car la température maximale des meules ne doit pas dépasser 38° pour ne pas colmater la meule et éviter l'oxydation de la farine. La farine complète contient au final 5% de son, Bruno utilisant le reste du son (l'enveloppe des grains) pour une partie de l'alimentation de ses quelques bovins (des jeunes bœufs Salers élevés pour leur viande) et de ses volailles. Et quand la farine est moulue, elle patiente une quinzaine de jours avant de passer entre les mains de Katia pour être transformée en pain. Pourquoi toutes ces "pauses" ? Parce que comme le répète Bruno, c'est de la matière vivante, il faut la laisser "reposer" à certains moments.
Sacs de son
Katia Fleury dans son fournil
Côté fournil, c'est Katia la cheffe d'orchestre depuis 7 ans : chaque soir, elle ré-alimente le levain pour le lendemain.
Le pétrin
Ce levain, lui aussi matière vivante, contribue à développer les qualités nutritionnelles de la farine, nous aide à mieux digérer le pain et lui permet de se conserver mieux. La farine mélangée à l'eau et au levain constitue la pâte, pétrie pendant 10 à 15 minutes dans un pétrin électrique. La première fermentation prend 2 à 3 heures. Katia coupe ensuite la pâte en patons qu'elle dépose dans des bannettes, ces petits paniers qui donnent la forme aux pains. 1 à 2 heures (selon la température et l'humidité de l'air) sont nécessaires pour cette seconde fermentation.
Les bannettes dans lesquelles reposent les miches façonnées
Le four à bois
L'enfournement intervient environ 5 heures après la sortie du pétrin. Katia doit aussi allumer le four à bois 4 heures avant la première fournée afin d'atteindre les 250° nécessaires à la cuisson des pains.
Les cendres du four à bois
Les beaux pains de Katia
Chaque fournée contient 70 pains et Katia en assure généralement trois par jour. Et que ça chauffe !!!
C'est après tout cela que les délicieux pains de Bruno et Katia arrivent avec Steve dans notre amap, encore tièdes et ayant bénéficié de l'attention de ces passionnés à chaque étape de leur élaboration.
Les vacances ? Katia en prend un peu, Bruno pas assez, il y a toujours quelque chose à faire, et il faut s'occuper des animaux, même en été...
Reportage : Virginie A. Photos : Isabelle C. Juin 2022
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